Reviews and Comments

Je connaissais déjà les travaux de Casilli, pour l'avoir déjà entendu ou bien avoir dévoré la série documentaire "invisibles" dont il était le conseiller scientifique. Il défend une vision de l'intelligence artificielle qui va complètement à l'encontre de la vision médiatique souvent admise. Il rend visible ces "tâcherons" du clic qui alimentent et corrigent l'automation ou donnent, parfois sans le savoir, leurs données personnelles. Pour autant, je trouve que le livre est raté sur la forme : l'auteur se répète beaucoup, tourne en rond, convoque énormément de références sans trop les détailler... Et il donne l'impression de parfois faire des raccourcis ou du cherry-picking. Bref, j'ai trouvé la lecture parfois laborieuse, mais j'ai appris des choses.

J'avais adoré le premier volume, m'était ennuyée dans le second, ce troisième volume clôt "la maison des jeux" et me laisse un sentiment mitigé. D'un côté, c'est une "vraie fin", qui vient convoquer des éléments laissés en plan dans les deux premiers tomes, mais d'un autre, il y a beaucoup de longueurs et de rebondissements prévisibles.

J'ai beaucoup aimé la BD "toutes les princesses meurent après minuit" de Quentin Zutton, que j'ai trouvé douce. On y suit une famille pendant une journée : le jeune frère qui joue à s'imaginer princesse avec son meilleur copain, la grande soeur adolescente et la mère qui pose un ultimatum au père fuyant et lâche. C'est à la fois une histoire de personnes sensibles et de liens, j'ai trouvé ça chouette et beau.

Cette BD documentaire fait une synthèse des problématiques environnementales du numérique : ayant lu les publications de l'ADEME ou du shift project, je n'y ai pas appris grand chose. Et j'ai un gros problème avec le traitement où des fausses captures d'écran de télévision se mêlent aux affirmations scientifiques. Je trouve que ça rend le tout flou et indigeste.

Si vous cherchez un beau roman avec un personnage féminin fort, allez-y ! Il se passe dans l'Australie de la fin du XIXe siècle, où la famille d'Eliza a fait fortune dans la pêche d'huitres perlières. Quand le bateau revient sans le père d'Eliza, cette dernière va enquêter. En trame de fond, on découvre aussi des éléments sur l'immigration en Australie, les violences contre les aborigènes, la place des femmes.

Gros coup de coeur pour cette #BD autobiographique : Wanda Hagedorn y raconte son enfance et celle de ses trois soeurs dans la Pologne communiste des années 1960. Elle porte, 40 ans plus tard, un regard sur sa famille (CW culture du viol, violences patriarcales et inceste) qui analyse a posteriori son vécu sous un angle féministe. Dans son récit, la littérature et l'imaginaire tiennent une place importante, ça m'a beaucoup touchée.

Les Pinçon-Charlot, sociologues spécialisé-es dans la grande richesse, expliquent, au travers du déroulé du procès Cahuzac, les enjeux et processus de la fraude fiscale en France. Les dessins sont laids (les personnages ont des regards vides, c’est très étrange), mais c’est vraiment très éclairant, notamment sur le rejet par la bourgeoisie de toute forme de solidarité ou le système judiciaire qui favorise les plus riches.

L’autrice y raconte son parcours de femme handicapée militante, le mettant en perspective avec son analyse qui s’appuie sur de nombreuses sources issues des disability studies. Pour moi qui entrevoit peu à peu la violence du capacitisme, ce livre est une révélation.

Marie Colmant et Gérard Lefort sont deux journalistes culturels ayant travaillé dans les années 1980 et 1990 pour le journal Libération. Iels racontent ici le célèbre journal français vu de l'intérieur, sans non plus sombrer dans une éloge sans critique. Le journal y est décrit comme un lieu où peut s'exprimer une vraie créativité, mais avec une ambiance qui n'est pas dénuée de sexisme, d'homophobie et de la direction peu démocratique de Serge July. On découvre l'envers du décor de certaines Unes emblématiques du journal ou du travail sur les défilés de haute-couture ou du festival de Cannes. J'aurais aimé avoir plus d'éléments sur la rubrique politique, par exemple, mais en même temps ce sont deux journalistes culturels qui se racontent. J'ai eu du mal à accrocher avec le dessin, un peu caricatural, mais finalement, il fonctionne bien avec le ton de la BD.